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mercredi 6 avril 2016

Le bain de la Jouvence


Curieusement, le nombrilisme est l’invité de marque à cette noce républicaine où l’on sert une daube vraiment nationale. Parmi les convives de haut rang, l’on note, prestige oblige, Monsieur l’opportunisme au bras Madame l’imbécillité extrême. Enfin, l’Algérie accède au Panthéon de la médiocrité sur fond de musique raï et de folklore haut en couleur à partir de cette coupole où l’on pète plus fort que tous les derrières réunis en cette journée immémoriale. L’on rentre de plain-pied dans la civilisation des « zânes » où l’on dispense un cours magistral devant un parterre aussi acquis que conquis. La salle ovoïde, chauffée à blanc au mazout frelaté du langage, ovationne à chaque mot dilaté d’un cloaque dédié à l’ouvrage. Son Éminence rouge et noire, le père de la théorie révolutionnaire, le professeur ayant consacré l’unicité de la pensée et l’uniformité de la langue de bois universelle tance les gens nombreux venus lui prêter allégeance. Cette fameuse journée doublement justifiée est venue à point nommé souffler les amis de Mazafran et réhabiliter un copain d’avant. L’on célèbre par la même occasion la naissance d’un Rambo algérien et la mise en service d’un train amphibie pour une première en Algérie.

Le ton est on ne peut plus solennel ! L’amour de la patrie passe nécessairement par celui du président. Pour aimer l’Algérie, il faut aduler ce dernier. En donnant de la voix, ils braillent très fort et dans leur euphorie, ils oublient qu’ils font du tort à la personne qu’ils adorent. L’on ne parle que de lui, l’on ne vit que par lui, le messie du coin qui leur enjoint de se taire, au nom de la vie. S’ils n’avaient été si imbéciles, ils nous auraient au moins appris le langage des signes et à lire sur les lèvres. Nous aurions déchiffré tous les discours en prime des baisers. Cependant, n’ayant nul besoin d’une parole, il suffit à son excellence juste de penser. Tout le monde se met au diapason du roi et gare aux brebis galeuses qui auraient le malheur de ne pas apprendre la leçon. La sagesse recommande de lui accorder le repos du guerrier, mais quand le sage montre la lune, l’idiot regarde le doigt, selon un brillant adage.

Curieusement, l’on avance le carrosse de madame ! Bizarrement, l’on annonce un monsieur qui avance d’un pas sûr et mesuré. Ainsi aurait parlé Zarathoustra en faisant titiller l’esprit de Nietzche en prenant à la gorge la femme et la vérité. Le véritable homme n’aime-t-il que le danger et le jeu ? Le jouet est-il féminin singulier ou masculin pluriel ? La dialectique du loup et de l’agneau conduit-elle à la Cité idéale sous cette coupole où l’on ravisse la renommée à tous les chiens de Pavlov et de la bergerie. Sonnez les cors ! L’on déclare la chasse ouverte aux trésors. L’Algérie des paradoxes se met à l’heure de l’intox et du faux bilan provisoire. L’on atténue l’invocation et l’on invoque les circonstances à l’honneur de la virginité de son excellence qui convole en noces bizarres.

Cependant, non loin de ce canular, l’on récite à l’école de la rue, les enfants et le procureur auquel l’on a mis un habit plus grand qu’il se fit tout petit. Sentant sa mort prochaine, le laboureur dit au procureur de la République algérienne, ne travaillez point avec tant de peine, cela ne sert à rien de suer, à chaque mouton suffit sa laine. Panurge n’est pas très loin et cela est urgent de décanter les esprits avant que le ciel ne moutonne ; il est déjà vache, pardi !

À Mazafran, ils se la coulent douce les gars de l’opposition en brandissant des gants de velours. C’est à devenir fou de voir ces messieurs parader dans les couloirs de la République en mangeant dans le même râtelier des gens qu’ils critiquent. Anciens chefs de gouvernement et autres députés qui ne juraient que par le président se retrouvent parachutés à la manière des loups dans la jungle des sourds-muets. Leur plan, paraît-il, est meilleur qu’un avril donnant plus de blé dans ce printemps arabe de terre brûlée. À leurs voix atones qu’ils entonnent en chœur, ils carillonnent aux sons et lumières qu’ils ont inventé une nouvelle Algérie : la leur. Ainsi va l’eau à la cruche dans ce bled de derviches où le peuple est le seul et unique mouton.

« L’intime ministre » selon la lettre arabe « Khalil » vient de jeter son dévolu de nouveau sur l’Algérie qui se plie en quatre pour le recevoir avec tous les honneurs, pourtant, il fut à l’origine d’une catastrophe évitée de justesse grâce à l’intervention de feu son excellence Hugo Chávez. En effet, tout le monde se souvient de la fameuse loi avortée par le Président de la République au dernier moment sauf ces messieurs, ces caciques du pouvoir qui défient jusqu’à notre mémoire. Soit ! Monsieur n’est point un voleur quoique ce soit à la justice de se prononcer, pas au quidam du coin qui débarque du train qui n’a jamais quitté une gare. Moi, l’habitant de mon cœur où vit l’Algérie, je ne suis pas sans savoir qu’il a sérieusement mis en danger le pays et les générations entières, celles d’aujourd’hui et celles de demain aussi. Il a commis une faute tellement grave qu’elle est irréparable, dûtes-vous ameuter toutes les raisons du monde. C’est tellement indélébile comme péché qu’il est strictement impossible de le laver.

 Tout d’abord, il faut un bain de foule juste le temps de noyer le poisson et ensuite passer aux choses sérieuses : L’Algérie, paraît-il, court un danger véritable au niveau des frontières au point que même l’opposition se mette en rang serré ! Alors, que fait-on des loups ? Ceux-ci sont à l’intérieur juste sous notre balcon républicain. En tout cas, c’est de bonne guerre toute cette armada déployée au service de l’amour de la patrie qu’on ne cesse de trahir à coups de traîtrise répétée. Il paraît, qu’il faut gueuler plus fort pour faire accroire à l’amour dans un pays qui peine à se relever et où la population jeune est commandée par de séniles idiots et imbéciles. Les Algériens sont-ils des canards sauvages pour les canarder à longueur de temps avec de vils commérages ?

Les loups se mangent-ils entre eux dans ce village où la vertu se fait détrousser par une assemblée abêtie à toute heure de la journée ? Le bain de la Jouvence passe-t-il nécessairement par le lavage de notre esprit ? Non, je ne peux cautionner un tel délire où l’on travestit la vérité dans le dessein de perdurer et je ne peux cultiver le pardon pour absoudre Satan. Faut-il être perfide et lâche pour vous plaire ? Allez, c’est décidé ! L’on taille les discours à la mesure de l’imbécillité et l’on ordonne au tambour de battre le pas cadencé. L’Algérie fière avance dans le sens contraire de l’évolution et il faut rejouer la note en Ré mineur pour harmoniser la partition. Les mauvaises herbes ont la vie dure autant que les langues dont le verbe est d’un bois vert et impur. La nouvelle constitution doit arrêter, à soixante-cinq ans, l’âge de la déconfiture. Cependant ces messieurs de la nomenklatura sont tellement sûrs qu’ils prolongent la vie au-delà de la quadrature du cercle. N’ont-ils pas inventé le quatrième mandat en souillant la vierge constitution ?

Du bain de la coupole au bain de Mazafran, l’on débouche carrément dans le bain de la démence en invoquant les chouyoukhs et les Esprits saints de Bennahar, la capitale spectaculaire de Djelfa. Ici, à base de l’alfa, l’on rafistole les hymens des garçons ayant trop forcé sur l’alcool prohibé. Ici, le sable, poudre et or, s’enroule comme un serpent autour du cou fragile de la vérité que l’on baptise afin que Monsieur retrouve sa virginité qu’un procureur pervers aurait prise, un certain soir où le rêve se transforma en cauchemar. Ci-gît la vie, au-delà du mausolée de la révolution, où l’esprit tangue de raison en raison, un radeau de fortune emporté par les flots fous d’un océan habité par les démons.

Le monsieur s’est servi durant la révolution, à l’ère de Boumediene et durant le règne du Président Bouteflika auquel il fit une entourloupette à l’image d’une piètre galéjade le soir d’une aubade au bal de la république planétaire. L’Algérie est tellement vaste qu’elle ressemble à un continent et tellement riche qu’elle donne à celui qui est chiche. Quant aux braves, ils fument le calumet de la paix en sirotant du thé à l’ombre d’un palmier épris d’une oasis. L’on retourne à l’âge de pierre en ce temps de vache laitière aussi maigre qu’un gringalet. Oh, mon Dieu quelle misère, ce paltoquet ! C’est à l’aune de la zaouïa que l’on jauge de la teneur des gens comme au temps des lupanars et de la virilité des garçons. Au suivant ! Au suivant ! Au suivant ! aurait dit une ombre venue d’un plat pays qui est le mien. Allez, silence, on tourne ! Oye, bonnes gens ! Il faut encenser les lieux et invoquer la diligence des saints patrons pour que réussisse le bain de Jouvence. La zaouïa se met à l’heure de la confession et l’on rachète l’homme de la tyrannie du péché pour lui rendre sa liberté à hauteur de la rédemption. Puisque la zaouïa se substitue à la justice et à la Présidence, alors autant nommer les petits chefs zaouïs en walis et le grand zaouï en Président. L’on rebaptise aussi le village en « dachra », la ville en « ksar », le pays en gourbi, le peuple en « ghachi » et les gens en « maouachis ». C’est beau, le retour aux sources ! Vive la Ripoublique !

  

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